vendredi 28 novembre 2008

Solidarité ultra-marine avec la Guyane


Imaginez un peu...
Tahiti bloquée par des barrages à Mahina, Arue, Pirae, Papeete, Faaa, Punaauia, Punaruu, des camions en travers de la route à vingt points stratégiques de l'île, et, du coup, impossibilité totale de circuler.... Des touristes qui quittent leur hôtel à pied pour l'aéroport international de Faaa qui ferme et annule vol après vol... Les commerces qui baissent le rideau de fer pendant plusieurs jours transformant la cité en ville fantôme... Les écoles qui ferment purement et simplement... Des menaces de coupures de courant de longue durée... Le port de Papeete paralysé... Et des débordements la nuit avec des scènes de violence urbaine et de quasi émeutes...
Wouah ouh Lolo, qu'est-ce que tu nous fais là ?
C'est quoi ce scénario catastrophe ?
Et ben oui c'est de la fiction en Polynésie mais c'est une réalité chez nos concitoyens guyanais !
Donc arrêtons de nous regarder le pito * un instant et soulignons cette situation dont les médias ont mis un certain temps à relater l'existence, au grand désespoir des guyanais qui ne comprenaient pas d'être ainsi zappés.
Pourquoi tout ce bazar ?
Lisez plutôt cet article de Laurent Marot sur Lemonde.fr

La Guyane était toujours paralysée dans la soirée de jeudi 27 novembre : stations-services fermées faute d'approvisionnement, rideaux baissés dans les commerces, établissements scolaires fermés, distribution de courrier suspendue, accès routier au port de commerce et à l'aéroport bloqués, activités suspendues au Centre spatial... Depuis lundi 24 novembre, des barrages bloquent les principaux axes routiers de Guyane, dans l'agglomération de Cayenne, à Kourou, sur la Route Nationale 1, à Saint Laurent. Le mouvement a été lancé par des associations de consommateurs et les organisations de transporteurs, avec le soutien des socioprofessionnels, des élus et de la population locale, pour demander une baisse de 50 centimes sur les carburants, dont les prix sont administrés par l'Etat dans les départements d'outre-mer.

En marge du mouvement, dans la nuit de jeudi à vendredi, pour la troisième fois cette semaine à Cayenne, des affrontements ont eu lieu entre jeunes et forces de l'ordre, trois voitures étant brûlées et deux personnes arrêtées.

Les blocages routiers vont entraîner un report du prochain tir d'Ariane 5 initialement prévu le 10 décembre de Kourou (Guyane), a indiqué jeudi soir à l'AFP le Centre National d'Etudes Spatiales (Cnes). Vendredi, le seul port de commerce de la Guyane devait être fermé et samedi l'aéroport international de Rochambeau le sera également, a par ailleurs annoncé le président de la Chambre de commerce et d'industrie de la Guyane, Jean-Paul Le Pelletier.

En moins de deux ans, le carburant a augmenté de 46 centimes en Guyane, pour atteindre aujourd'hui 1,77 euro le litre d'essence sans plomb, et 1,55 euro pour le gazole.

Jeudi, le préfet a confirmé une baisse de 10 centimes par litre le 1er décembre, qui s'ajoutera à la baisse liée à l'évolution du cours du brut. "Je veux faire accepter aux pétroliers l'idée d'une baisse plus significative et d'un blocage des prix pendant trois mois", a déclaré jeudi à l'AFP le secrétaire d'Etat à l'outre-mer Yves Jégo. "J'espère que dans ce cas de figure la Région Guyane acceptera de faire un effort et de baisser la taxe [Spéciale sur les Carburants]", a-t-il ajouté.

La Taxe Spéciale sur les Carburants, qui représente plus d'un tiers du prix à la pompe, est allouée aux collectivités - en Guyane, l'Etat n'encaisse pas de recettes sur l'essence et le gazole. Votée par le conseil régional, cette taxe est à son niveau maximum. Réunis mercredi, les élus régionaux ont refusé de baisser cette recette en raison de la fragilité des finances locales.

MISSION D'INSPECTION

M. Jego a également annoncé l'arrivée la semaine prochaine en Guyane d'une mission d'inspection sur "les coûts des carburants dans les DOMS", qui "suscitent nombre d'interrogations du fait de leur opacité".

L'augmentation du prix des carburants en Guyane résulte surtout du passage aux normes européennes des carburants. Avant 2007, la Guyane s'alimentait à Trinidad et Tobago en carburants dont la composition était nocive pour certains types de moteurs.

Fin 2006, une décision de justice favorable aux concessionnaires automobiles de Guyane a contraint les compagnies pétrolières à changer de fournisseurs pour vendre du carburant conforme à la réglementation. Depuis février 2007, le sans plomb et le gazole vendus en Guyane sont donc importés de la raffinerie de la SARA, en Martinique, à un prix supérieur d'environ 30 centimes par rapport au fournisseur antérieur.

La préfecture de Guyane a alors décidé d'appliquer cette augmentation par paliers, pour étaler la hausse, en finançant les pertes des compagnies pétrolières avec un prêt de l'Agence Française de Développement. La montée du cours du pétrole jusqu'en juillet 2008, et une hausse sensible de la taxe destinée aux collectivités locales ont amplifié le phénomène.

...et ça ne risque pas de s'arranger de si tôt puisque la région Guyane vient de refuser la baisse de la taxe qu'elle contrôle.

Un autre résumé ici, sur RUE89 avec témoignages d'internautes guyanais comme celui-ci :

Alors oui, tout est bloqué. Pour ceux qui comme moi n’avaient rien prévu, plus rien dans le frigo, et de toutes façons, comme EDF s’y met et qu’on a droit à 7-8 heures de coupure/jour, les réserves mises dans la partie congélo sont pour la plupart bonnes à jeter.
Pas de marché non plus car les maraîchers n’ont pas accès à la ville…Heureusement pour nous,dans cette partie-là du pays, il y a le Surinam à 5 mn de pirogue, qui, une fois n’est pas coutume, va voir débarquer un flux de réfugiés français sans visa (car pas moyen d’en obtenir un par ces temps de crise)!

Comme beaucoup, je soutiens la grogne initiale, parce qu’on est vraiment pris pour des cons ici…mais je déplore deux choses:

1/ à vif: certains barrages bloquent les ambulances. Le pédiatre de garde appelé pour une urgence dans mon service ce matin s’est vu refusé le passage du barrage…et ça, c’est grave, très grave…faut remettre les priorités dans l’ordre et penser à agir pour le peuple, pas que pour son porte-monnaie!

2/ sur le fond: je regrette que la Guyane et les guyanais tellement pris pour des cons par l’Etat français n’en profitent pas pour réfléchir et mettre en place des alternatives à l’essence.
Au moins, vu que la seule chose qui importe à la France ici est le CNES (centre spatial de Kourou),on démontrerait qu’on peut se diriger vers l’autonomie, au moins énergétique (il y a de quoi faire), et ça aurait un impact beaucoup plus fort que de mendier 50 centimes au litre de moins à cet Etat si méprisant, alors qu’au vu de la situation mondiale du pétrole, la situation se répètera obligatoirement dans quelques mois.

Il n'y a pas qu'à Tahiti que l'on se demande si l'Etat ne se désengage pas de l'outre-mer, contrairement à ce que martèlent Sarko et Jego (sont dans un bateau...)...

Une pensée solidaire donc avec tous les Guyanais plongés dans cette crise majeure...

Photos extraites du site guyanais BLADA.COM

* nombril


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2 commentaires:

Fred O Fenua a dit…

Et ben, j'crois que c'est la première fois (j'ai pas vérifié) que le lancement d'un engin spatial est retardé à cause de manifs ! :s ooohhhh les copains laissez décoller la fusée siouplait :o)

Anonyme a dit…

Merci d'avoir relayé toi aussi l'info Lolo!
J'ai une amie sur place, c'est une sale période...