lundi 3 mars 2008

Légalité et Légitimité (article sérieux avec une affiche détournée à la fin pour déconner)


Je voudrais ne jamais verser dans l’excès et encore moins dans l’extrêmisme.
C’est pour cela que je ne qualifierai jamais le gouvernement Flosso-Temarien de “dictature”, et d’ “illégal”, même si j'ai une piètre opinion d'une majorité de gens qui le composent.
Par contre, je veux bien rester faire-play mais il y a des notions, qui, me semble-t-il, ne doivent pas être perdues de vue.
Quelques recherches sur le web m’ont conduites sur un article de Pierre Calame sur le site de l’Institut de recherche et débat sur la gouvernance intitulé De la légalité à la légitimité de la gouvernance.
J’en reproduis ci-après un bon extrait car c’est très utile pour éclairer, que dis-je : éclairer... illuminer ce qui se passe en Polynésie :

Dans une « société de contrat », la légalité des actes des gouvernants ne suffit pas à asseoir leur autorité. En effet, on constate un peu partout dans le monde qu’un fossé se creuse entre légalité et légitimité de la gouvernance. Nous avons d’ailleurs noté, analysant dans les crises de la gouvernance, qu’une des impasses actuelles est de faire comme si par définition, au moins dans les pays démocratiques, la légalité de la gouvernance suffisait à en asseoir la légitimité aux yeux du peuple. Il faut s’attarder ici sur cette distinction qui sera au cœur de la gouvernance de demain.
Une gouvernance est légale quand l’exercice du pouvoir est régi par un ensemble de règles et de principes issus de la tradition ou consignés dans une Constitution, des lois écrites et des jurisprudences.
La légitimité de la gouvernance est une notion beaucoup plus subjective. Elle renvoie au sentiment de la population que le pouvoir politique et administratif est exercé par les "bonnes" personnes, selon de "bonnes" pratiques et dans l’intérêt commun. Cette adhésion profonde de la population et d’une société tout entière à la manière dont elle est gouvernée est une dimension essentielle de la gouvernance. Pour durer, celle-ci ne peut jamais, quelque soit l’autoritarisme d’un régime et l’importance des moyens répressifs à sa disposition, s’imposer par la pure contrainte ; elle doit rencontrer dans le cœur de la société un minimum d’écho et d’adhésion.
La démocratie a toujours tendance à considérer qu’une gouvernance légale est automatiquement légitime puisque l’adhésion populaire aux formes d’exercice du pouvoir s’est manifestée par le vote majoritaire des Constitutions et des lois et que l’adhésion aux modalités concrètes de l’exercice de ce pouvoir se renouvelle périodiquement par les élections. La réalité est bien plus complexe que la théorie. Si, dans certains pays, la Constitution est l’acte fondateur de la communauté, dans beaucoup d’autres c’est un document pour spécialistes, mal connu du peuple et sans lien réel avec la pratique du pouvoir. Le jeu démocratique lui-même peut parfaitement faciliter une tyrannie des intérêts de la majorité, dans laquelle d’importantes minorités ne se reconnaissent pas. Dans beaucoup de pays, en Afrique, en Amérique Latine, en Asie, où le modèle de la démocratie parlementaire a été importé dans les valises de l’ancienne puissance coloniale, le nouveau système politique s’est superposé à des régulations anciennes, consacrées et légitimées par la tradition. Ces régulations anciennes ont été contraintes de se travestir ou de se dissimuler mais elles restent néanmoins vivantes. On le constate chaque jour, par exemple, avec la superposition des droits fonciers ou des modes de règlement des conflits.
Au sein même des sociétés où est née la démocratie parlementaire on note un discrédit croissant de la politique, le déclin du respect de la chose publique, un décalage entre les modes d’exercice du pouvoir et les aspirations de la société ou la nature des défis à relever. C’est le révélateur d’un fossé en train de se creuser entre légalité et légitimité du pouvoir ; ce fossé, s’il persistait, serait une menace pour la démocratie elle-même.
L’efficacité de la gouvernance et sa légitimité se renforcent ou se dégradent mutuellement. Pour être moteur d’une politique de développement un Etat, par exemple, doit être fort et respecté, doit pouvoir convier les acteurs à se mobiliser ensemble, faire respecter des règles, lever l’impôt, mobiliser l’épargne. Il ne saura le faire, régime démocratique ou pas, s’il n’est pas respecté. Et il n’est pas respecté s’il apparaît inefficace ou corrompu. Comment défendre l’idée d’une action publique renforcée si celle qui existe est jugée inefficace, conduite dans l’intérêt d’une minorité sans réel souci du bien commun ou si l’Etat impose des réponses à des questions qu’il n’a pas comprises ? Comment plaider pour l’action publique si l’administration est perçue comme peuplée de fonctionnaires au mieux bornés, au pire paresseux, incompétents et corrompus ?
Renforcer la légitimité de la gouvernance, du local au mondial, constitue aujourd’hui un enjeu essentiel.
La gouvernance, pour être légitime, doit réunir cinq qualités :
* répondre à un besoin ressenti par la communauté ;
* reposer sur des valeurs et des principes communs et reconnus ;
* être équitable ;
* être exercée efficacement par des gouvernants responsables et dignes de confiance ;
* appliquer le principe de la moindre contrainte.
Ces cinq qualités doivent se trouver à tous les niveaux de gouvernance...


Je crois qu’il n’y a pas grand chose à ajouter à ce brillant exposé théorique et donc non partisan (personne n'est cité) qui colle parfaitement à la situation polynésienne, si ce n’est que le nouveau gouvernement polynésien est donc bien légal.

Mais loin d'être légitime...

Je fais des recherches également sur le thème "morale et politique"...et vu les résultats nombreux sur Google, ça promet !

Je vous laisse avec le dernier film sorti à Papeete...

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5 commentaires:

Anonyme a dit…

Encore une fois, ton affiche correspond parfaitement à la situation.

Bonne continuation.

christèle a dit…

L'analyse est juste, le constat est fort : la démocratie atteint là une des ses limites, ce n'est pas pour autant une remise en cause du système.

La légitimité des représentants démocratiquement élus, c'est vrai, c'est bien là que ce situe le problème. Regarde en Russie où Poutine à parfaitement su utiliser à son avantage les rouages de la démocratie.

Comment retrouver cette légitimité ? on espérait il y peu qu'en changeant de génération d'hommes politiques on pourrait faire évoluer le système. J'ai bien peur que ce soit un leurre.
C'est comme si une fois élus ils estimaient ne plus avoir de comptes à rendre. Il faut trouver un moyen de les responsabiliser tout au long de leur mandat, sans pour autant tomber dans les travers d'une gouvernance par référendum (ingérable de toutes façons).

nb : c'est dingue c'qu'on peut écrire sérieusement quand on s'y met, bon allez j'allume la tv histoire de décompresser.

LOLO a dit…

>> FILDY >> Merci ! Y'en a d'autres en préparation...

>> CHRISTELE >> Tout à fait Professeur Christèle. Oui le cas de Poutine est le dernier exemple à l'étranger, en effet !

christèle a dit…

Quoi prof ? moi ? ahh je suis vexée, bon la prochaine fois je mettrais mon deguisement d'Eve Angeli

LOLO a dit…

>> CHRISTELE >> J'attends ça avec impatience, un évangélisme de Christèle (et en maillot de bain)...